mardi 13 mars 2012

Conseil municipal : Notre avis sur le PADD de Douarnenez


Pour nous, ce PADD (projet d'aménagement et de développement durable) - accessible en ligne sur le site de la commune - est contraire aux principes d'aménagement durable.
Ce PADD est le passage obligé avant l'élaboration du PLU lui-même : choix des zonages à la parcelle (espaces agricoles, naturels et boisés, ou constructibles) et définition des règles de construction.
L'expression des intentions communales et la formulation des têtes de chapitres sont des déclarations toutes faites  qu'on peut retrouver dans les PADD de n'importe quelle commune, puisqu'elles sont imposées par les nouvelles lois d'Urbanisme, la loi littoral et le le Grenelle de l'Environnement.  Si on lit un peu plus dans le détail, on se se rend compte que
 la plupart des orientations données dans ce PADD sont contraires à l'esprit de ces nouvelles lois, mais sont également contradictoires, voire incompatibles  entre elles.
Cette incohérence voulue, pour brouiller les cartes, (auprès des services de l'Etat et des simples habitants),  reflète une vision inchangée de l'urbanisation, une poursuite de la logique de gaspillage d'espace de l'ancien POS et vous laissera toute latitude pour élaborer un PLU qui fera la part belle aux intérêts particuliers, qui en tireront une plus-value substantielle. Explications détaillées :
1. Des orientations qui poursuivent la logique de gaspillage de l'espace

A) Maintien du rythme de consommation de l'espace des dernières décennies...
En introduction de ce PADD, il est affirmé que "la logique de planification urbaine ayant prévalu dans le passé, a conduit à un étalement urbain significatif et une réduction sensible des espaces agricoles et naturels" et que "la prise de conscience de ces effets pervers" va permettre aux nouveaux PLU d'évoluer.
Or, quel changement apportez-vous par rapport aux décennies précédentes ? Aucun.
En effet, depuis 20 ans, la consommation foncière sur le territoire de la commune s'est faite sur le rythme de 3 hectares par an entre 1980 et 2000 (70 hectares consommés), 2,5 hectares par an depuis 2000 (30 hectares).
Or ce PADD prévoit de consommer 2,75 hectares par an, soit 33 hectares en 12 ans de nouvelles surfaces constructibles prises sur des terres agricoles ou des espaces naturels. 
Donc contrairement aux belles intentions affichées, aucune inflexion n'est adoptée, la consommation d'espace se poursuit au même rythme, en contradiction totale avec les principes définis par les nouvelles lois précédemment citées.  

B) ...non garant de l'augmentation de la population
Vous justifiez le besoin de nouveaux espaces constructibles, par  l'objectif  d'enrayer la diminution du nombre d'habitants constatée par les derniers recensements. Pourtant,  il n'est pas avéré qu'il suffit d'augmenter la consommation d'espace pour augmenter la population, preuve en est que malgré une consommation de plus de 100 hectares depuis 1980, la population n'a fait que diminuer !

2. Des orientations marquées par l'absence de cohérence
Non seulement ce padd n'est pas en conformité avec les principes d'aménagement durable définis par les nouvelles lois d'urbanisme, mais en plus il est rempli d'incohérences : les orientations disent tout et son contraire.

A) en matière d'habitat et déplacements
1.      Comment dire dans le même document qu'on va "Donner la priorité au renouvellement urbain en centre urbain" et prévoir que "près de 53% de la production de logements neufs s’effectuera en extension urbaine" ? C'est contradictoire, on ne peut pas prévoir à la fois de reconquérir prioritairement en le densifiant le tissu urbain existant et de consommer encore de nouvelles emrpises foncières. Des études ont montré que plus les communes s'étalaient, plus leurs centres urbains étaient désertés. Avant de rendre de nouveaux terrains constructibles, il faut d'abord rénover les logements vacants dans les quartiers anciens, reconquérir les friches, faire le bilan des maisons à vendre, des terrains de lotissement non encore vendus, se concerter avec les communes voisines qui élaborent également de nouveaux PLU. ous regrettons que le choix d'un PLU intercommunal n'ait pas été fait à l'échelle de Douarnenez Communauté. Il est temps enfin d'arrêter la concurrence entre communes du même territoire pour attirer de nouveaux habitants.

2.      Comment dire dans le même document qu'on va "Favoriser des formes urbaines compactes en extension urbaine", et proposer "une densité de  20 logements à l'hectare". Cette densité fait perdurer le modèle d'habitat pavillonnaire en lotissement, gaspilleur d'espace,  fermé sur lui-même,  dédié à la voiture, sans espaces communs autres que la voirie, dont les exemples sont trop nombreux sur la ville. Le document laisse entendre que des densités plus élevées passeraient obligatoirement par de l'habitat collectif. A aucun moment, n'apparaissent dans ce document les notions d'écohabitat, d'habitat groupé, qui respectent à la fois l'aspiration à l'habitat individuel, l'économie d'espace, la présence d'espaces publics partagés, ouverts sur la ville, à l'image des formes urbaines dans les quartiers anciens. A titre d'exemple, à Douarnenez, des maisons de ville alignées avec petits jardins permettent d'atteindre une densité d'au moins 60 logements à l'hectare, autant que des grandes barres d'immeubles. Voir des exemples de formes urbaines et leur densité sur Douarnenez

3.      Comment prévoir de "Promouvoir l’offre de transport en commun sur le territoire" et dans le même temps de "Renforcer le réseau routier interne de l’agglomération et  Anticiper les besoins en stationnements". On ne peut pas à la fois accentuer le tout voiture et espérer augmenter la fréquentation des transports publics. Remarque : puisque vous prévoyez de déplacer la gare routière, et si vous voulez qu'elle devienne un "pôle d'échanges multimodal", elle doit être associée à une aire de covoiturage sur le même lieu. 

B) en matière de paysage et d'environnement

1.      Comment  dire qu'on va "mettre en oeuvre une trame verte et bleue", c'est à dire "protéger les espaces boisés et les cours d'eau, réservoirs de biodiversité", et dans le même temps "prévoir le développement résidentiel du Bois d'Isis (Kerleyou et bois du Rohou)". Nous savons que depuis le début du mandat, vous voulez rendre constructibles une partie du bois classé du Rohou et désenclaver les parcelles au bout de la rue Noel Roquevert, déjà rendues constructibles en 2006 par la municipalité précédente. Vous allez enfin pouvoir sonner le glas du Bois d'Isis, lieu de promenade cher au coeur des Douarnenistes pour y installer des résidences de luxe (comme au domaine des Roches blanches), et y permettre l'enrichissement de leurs propriétaires. Nous constatons également que tous les extensions d'urbanisation que vous prévoyez sont situées sur les hauts de coteaux pour la vue sur mer, ce qui est incompatible avec la préservation des paysages.  

2.      Comment dire qu'on va "préserver les ressources naturelles", et prévoir de "ne garder en espaces boisés classés que les boisements situés en bord de cours d'eau". Or, dans son avis sur le plan algues vertes de la baie de douarnenez, le comité scientifique régional attire l'attention "qu'il est important pour l'écologie des cours d'eau de ménager une grande diversité des types de végétation" et ne pas y concentrer les boisements (ripisylve). Nous constatons qu'aucun inventaire précis des espaces boisés sur la ville, classés ou non, n'a été réalisé, ce qui vous laissera toute latitude pour en faire disparaître la plus grande partie.

3.      Comment allez vous concilier "inscrire tous les cours d'eau en zone naturelle pour protéger la ressource en eau" et devoir "étudier la faisabilité d'une implantation d'une installation de stockage de déchets inertes (ISDI) sur le territoire", c'est à dire sans doute régulariser le centre de stockage sauvage de déchets de chantier en zone naturelle, sur la rivière de Kervent, près de la route de Poullan, où des millions de m3 de déchets se sont accumulés depuis  1995,

4.      Comment dire qu'on va "Préserver la qualité paysagère des entrées de ville", en citant notamment la perspective sur la silhouette de la ville à partir de la route de Poullan sur mer, alors que cette entrée de ville a été sciemment exclue du périmètre de la ZPPAUP et que le "cône de vue" sur la baie y est obstrué par la vision des enseignes commerciales, de leurs panneaux d'affichage et de leurs fanions.

C) En matière d'activité économique
1.      Comment affirmer  que pourra être assuré à la fois "le développement des zones commerciales de périphérie et celui des commerces en centre ville":  les deux développements sont incompatibles. Chacun a pu constater à Douarnenez que plus les commerces s'installent en extérieur (déplacement de l'Intermarché au Drevers, agrandissement de la zone Leclerc de Toubalan), plus le commerce de centre ville dépérit.
Remarque : vous envisagez dans ce document "la densification commerciale au niveau du pôle du Drevers". Je rappelle à tous que cette construction, en zone humide, a été enfin reconnue par les Services de l'Etat comme complètement illégale au regard de la loi littorale, et qu'aucune nouvelle construction en extension d'urbanisation ne pourra y être autorisée.

2.      Pourquoi vouloir à tout prix "étendre la zone industrielle de Lannugat" pour attirer de nouvelles entreprises, cela n'est pas sûr là non plus que la loi littoral le permette, cela n'est pas sûr non plus que l'existence d'une zone industrielle soit un préalable à la création de nouvelles activités économiques. Là aussi, avant d'agrandir cette zone, il faut faire le bilan du taux d'occupation des bâtiments et des surfaces des zones industrielles de dz communauté, veiller à ne pas gaspiller l'espace non plus comme cela a été le cas jusqu'à présent, réserver cette zone à des activités purement industrielles. Il est possible d'accueillir dans le tissu urbain des entreprises artisanales et de services, si elles n'occasionnent pas de nuisances, sonores notamment, pour le voisinage des habitants.

3.      Comment vouloir à la fois "Préserver les activités traditionnelles de pêche", "Valoriser la richesse du patrimoine architectural" et prévoir dans le même temps de développer un certain type de plaisance (avec pontons lourds) au Rosmeur. Vous ne proposez pas de conserver le caractère patrimonial du port historique du Rosmeur, en restaurant ses cales et ses quais, en gardant la petite plaisance au mouillage.  

4.      Comment dire que vous allez "revaloriser les fronts de mer", (pour le tourisme) et dans le même temps "renforcer l'offre de stationnements à la plage des Sables Blancs". Il ne faut pas augmenter l'emprise des places de parking, simplement supprimer les stationnements face à la plage, et les déplacer plus en arrière.  Si des surfaces sont gagnées en arrière plage, elles doivent être dédiées à l'aménagement d'espaces publics  accueillants, avec le maintien des terrains de  tennis et le remplacement de la bulle par un court de tennis couvert, inexistant pour l'instant sur la ville. La plage qui est une des seules plages sur douarnenez à ne pas être touchée par les marées vertes est aujourd'hui colonisée par 2 résidences de Pierre et vacances, fermées 6 mois dans l'année. Il faut faire en sorte que cette plage et les quartiers qui l'entourent ne soient pas dédiés aux résidences secondaires de luxe, mais puissent être habités et fréquentés toute l'année par tous, facilement accessibles pas seulement en voiture, mais aussi en transport public et en vélo.

5.      comment déclarer que vous allez "sauvegarder l'activité agricole, limiter l'offre foncière en zone rurale pour préserver l'espace agricole" et dans le même temps proposer de consommer "33 nouveaux hectares" pris sur les terres agricoles. De nouvelles parcelles agricoles vont être sacrifiées,  dont certaines insérées dans le tissu urbain ou en proche périphérie, celles des exploitations agricoles considérées comme "non viables" dans le diagnostic agricole réalisé par la Chambre d'agriculture, sans définir ses critères de "viabilité". Nous donnons raison à Monsieur Caradec qui défend ses terres becs et ongles près de Lannugat, mais nous souhaiterions qu'il sache aussi défendre celle de ses collègues, ce qu'il n'a pas fait quand les terres agricoles de Kerguesten ont été rendues constructibles l'an dernier. Nous remarquons qu'à aucun moment, le modèle d'exploitation en agriculture biologique n'est mis en avant, pourtant c'est le seul modèle durable, et compatible avec une insertion dans le tissu urbain, du fait de l'absence d'épandages de pesticides
.
Donc en conclusion, poursuite de la  consommation foncière, au détriment des terres agricoles et des espaces naturels et boisés, renforcement des dessertes routières et de l'offre de stationnements au détriment des transports collectifs : ce PADD ne répond décidément pas à sa vocation de préserver l'univers des futures générations.

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